Je suis Tchadien, musulman… mais pas Séléka

Je suis Tchadien, musulman… mais pas Séléka dans ACTUALITES 1374572771130-300x265Depuis le 24 Mars 2013, une confusion plus pesante que ce qui en était s’est emparée de Bangui. Les Centrafricains tiennent leurs frères Tchadiens avec des pincettes, car on a l’impression que quand deux Tchadiens se suivent, le second est un Séléka. Dur de se voir coller gratuitement un tel cliché, quand on est Tchadien et surtout innocent de toutes ces histoires politico-militaires.

Ex-territoires de l’Afrique Equatoriale Française (AEF), le Tchad et la Centrafrique ont battis leur relation aussi bien sur la base de la politique française de l’époque coloniale, que sur les liens fraternels qui existent entre leurs peuples. Derrière cette fraternité si vantée par tous les leaders politiques des deux pays, se cache pourtant un dédain mutuel qui peine à se voiler à force que le temps passe. Beaucoup de Centrafricains pensent que le Tchad à travers son chef d’Etat actuel s’ingère de trop dans les affaires Centrafricano-centrafricaines. Dans les taxis de Bangui, je ne cesse d’entendre cette musique que chantent les passagers exaspérés pars les exactions de la Séléka : « Ces Tchadiens ! Ils nous ont arrachés notre pays », « C’est des sanguinaires, ces Tchadiens », « Déby nous le payera ». Une rumeur a même donné pour mort le président Déby, à la deuxième journée du coup de force qui a propulsé au pouvoir Djotodia. Mais pourquoi tant d’amalgame ?

1.      La nationalité

Le Tchad et la Centrafrique partage en commun plusieurs groupe ethnique. Les deux provinces limitrophes, Sido Tchad et Sido RCA,  forment une bonne illustration de la situation. La facilitation des migrations entre les deux pays, hormis les accords CEMAC, la porosité des frontières ont permis à beaucoup de Tchadiens de s’établir en Centrafrique. Situation réciproque pour les Centrafricains.

Au Tchad, nous avons des Kaba, des Sara, des Rounga… La Centrafrique en a aussi. Des peuples qui vivent entre les deux frontières. Qui ont l’une ou l’autre nationalité selon qu’ils sont plus adaptés à l’un ou l’autre pays. Il y en a qui sont Tchadiens au Tchad et Centrafricains en Centrafrique, donc détenteurs des deux nationalités. Voilà comment un Tchadien vivant à N’Djamena peut avoir sa grand-mère centrafricaine résidente à Batangafo. C’est du presque : un peuple, deux nationalités. En parlant des zones frontalières Tchado-Centrafricaine.

2.      La religion

Le Sud du Tchad est majoritairement composé de Chrétiens. Beaucoup de Centrafricains s’y sont établis pendant et après la colonisation française. A Sarh, dit-on, le Sango servait de langue véhiculaire. La dénomination d’un des marchés de Sarh est un des stigmates. Kétté gara (Petit marché, en Sango). La sanglante guerre civile, qui a ravagé le Tchad pendant plus de trente années, a favorisé la migration de nombreux ressortissant Tchadiens vers la Centrafrique.  Nombreux sont ceux qui ont fini par s’établir définitivement sur le territoire Centrafricain. Au fil des années, une sorte de nouveaux Centrafricains (d’origine tchadienne) a vu le jour. Si les parents Sara, donc ressortissants du Sud du Tchad sont facilement intégrés, il n’en est pas de même pour les Nordistes tchadien qui ont choisi la Centrafrique pour exil. La Centrafrique est laïc mais largement chrétienne. Les musulmans sont presque souvent considérés comme des occupants. Néanmoins, ces Nordistes finiront par s’y établir en ayant comme base le quartier Kilomètre Cinq, qui est considéré comme le poumon économique de la Centrafrique.

3.      La RCA, perdante des enjeux socio-économiques ?

La Centrafrique est un pays à économie fiscale. Une économie qui se repose donc grandement sur le contribuable centrafricain et l’exportation du diamant. Les commerces sont tenus par des étrangers. Notamment les Tchadiens. Un monopole qui joue en défaveur de la Centrafrique sur le plan socio-économique. Quand les commerçants musulmans font la grève, la Centrafrique le sent jusqu’à sa moelle épinière. Un secret de polichinelle que tous les pouvoirs qui étaient en place ont eu beaucoup du mal à voiler. Il faut faire un tour au marché, le vendredi à l’heure des prières musulmanes ou même les jours de fêtes musulmanes, pour s’en rendre compte. Un enjeu de taille pour lequel les Tchadiens centrafricainisés jouent le jeu, au détriment d’un peuple autochtone qu’ils ont fini par asphyxier. Un ami Tchadien me confiait, Ce ne sont pas de bons commerçants. Ils ne savent pas faire du commerce. Tout leur problème vient de là. Dur à avaler que tout le problème centrafricain existe parce que les molengué ti kodrö – les vrais fils du pays- ne savent pas faire du commerce. Mais hélas quand on y regarde de plus près, il pourrait bien être un des facteurs. Les autochtones ont abandonné le commerce au profit des étrangers. Tout le monde aimant travailler dans l’administration.

4.      La composition de la rébellion Séléka

Si j’ai les critères nets d’un Séléka (hormis que je n’ai pas de longs cheveux ébouriffés), c’est à cause de sa composition. Très hétéroclite, la Séléka est composée de seigneurs de guerre Centrafricains, Tchadiens et Soudanais. Devant tous les étrangers vivants en Centrafrique, les Tchadiens sont la masse la plus importante. Ils sautent tout de suite à l’œil, donc perçus comme plus nombreux au sein de la Séléka. Nous aurons plus la bonne cohabitation qui existait entre nous et les Centrafricains, regrette un vieillard Tchadien, face aux exactions de la Séléka. Une situation qui met en mal de nombreux tchadiens comme moi qui plaident contre des mauvaises actions, perpétrées par un groupe d’individus formé par les politiques centrafricains, eux-mêmes, qui ternissent l’image du Tchad entier.

Source: journaldebangui.com

 


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