Attentats terroristes: Polémiques entre Tripoli, Niamey et N’Djamena
La menace djihadiste effraye de nombreux pays frontaliers avec la Libye. La déclaration de Mamadou Issoufou, président du Niger, selon laquelle le Tchad est la prochaine cible sur la liste, suscite déjà une vive polémique.
Les auteurs des attentats au Niger contre un camp militaire à Agadez et le site nucléaire français à Arlit ne venaient pas de Libye, a rétorqué le Premier ministre libyen aux présidents du Niger et du Tchad qui ont accusé son pays d’“exporter” le terrorisme. “La nouvelle Libye ne tolère pas cela”, a averti Ali Zeidan depuis Bruxelles, relevant que le fils de l’ancien dirigeant libyen, Saadi, et d’anciens dignitaires du régime Kadhafi bénéficiaient du droit d’asile au Niger. S’adressant plus à l’Union européenne qu’à ses voisins, le numéro un de la Libye post-Kadhafi a garanti que son pays avait sécurisé ses frontières. “On ne laisse personne entrer ou sortir de Libye via le Mali”, a-t-il indiqué.
Les assaillants, selon toutes les informations que nous avons eues, venaient de Libye, du Sud libyen, avait affirmé samedi le président nigérien Mahamadou Issoufou. Et comme pour enfoncer le clou, le président du Niger a commenté : “Ces attaques confirment que notre voisin continue d’être une source de déstabilisation pour les pays du Sahel.” Pour Niamey, la menace principale s’est, en effet, déplacée de la frontière malienne vers la frontière libyenne. Mahamadou Issoufou, qui a confirmé lors d’une cérémonie d’hommage aux victimes des attentats d’Agadez et d’Arlit perpétrés le 23 mai par des groupes djihadistes, que les assaillants étaient venus du Sud libyen, a également fait part lundi d’un complot terroriste contre le Tchad, toujours depuis ce Sud libyen, devant une délégation officielle du Tchad. Il n’a pas donné de détails.
Le 27 avril dernier, le président tchadien, Idriss Déby, avait brandi la menace djihadiste qui guettait son pays. Sans langue de bois, il accusait ouvertement la Libye d’accueillir des camps rebelles tchadiens sur son territoire. “Je ne souhaite pas que la Libye nouvelle, dont j’ai reçu le Premier ministre, puisse être à l’origine d’une quelconque déstabilisation du Tchad”, avait déclaré Idriss Déby. Début mai, la crainte de N’Djamena semblait se concrétiser : le Tchad est alors ébranlé par un coup d’État manqué. Aucun lien avec la Libye, le putsch est orchestré par des Tchadiens. Les arrestations d’opposants se multiplient, mais aucune preuve concrète n’a été fournie sur les vrais commanditaires.
Les partis d’opposition crient au scandale et parlent d’une manipulation de l’opinion publique. “La situation au Mali, qui n’est qu’une conséquence de la crise en Libye, ne doit pas détourner la communauté internationale de son devoir de stabiliser la situation en Libye qui constitue aujourd’hui le principal foyer de déstabilisation du Sahel”, a encore insisté le président nigérien qui a plusieurs fois tiré la sonnette d’alarme depuis la chute de Kadhafi en 2011. Mahamadou Issoufou rappelle avoir prévenu depuis le déclenchement de la crise libyenne qu’il fallait éviter que les solutions après la défaite de Kadhafi soient pires que le mal et avoir précisé que si l’État libyen se “somalisait” ou tombait entre les mains d’intégristes, la solution serait pire.
Selon de nombreux experts, le Sud libyen est devenu, au cours des derniers mois, l’un des sanctuaires où se sont reformées des cellules djihadistes après que les mouvements islamistes armés ont été délogés du nord du Mali par l’opération militaire franco-tchadienne.
Source: liberte-algerie.com (29 Mai 2013)