66ème Festival de Cannes: La nuit, le Tchad est «Grigris»

66ème Festival de Cannes: La nuit, le Tchad est «Grigris» dans ACTUALITES 000dv1484316-300x274Il n’aura échappé à personne que l’Afrique n’est pas surreprésentée à Cannes. Les échos d’un boom, censé partir d’Afrique du Sud et se répandre par contagion vertueuse sur tout le continent, entendus régulièrement ces dix dernières années, n’ont pas été suivis d’effets très concrets.

Mahamat-Saleh Haroun est tchadien mais vit en France. Prix spécial du jury à Venise en 2006 avec Darrat, prix du jury à Cannes en 2010 pour Un homme qui crie, il a récolté des récompenses dans les festivals les plus prestigieux et le Moma à New York lui a rendu hommage.

Entre-deux. Son cinquième long métrage, Grigris, raconte la lutte d’un jeune danseur handicapé (il a une patte folle) à N’Djamena. Il cherche de l’argent afin de payer l’hospitalisation de son père malade. La thune qu’il réussit à récolter avec ses numéros chorégraphiques en boîte de nuit ne suffit plus. Aussi convainc-t-il un caïd local, Moussa, de l’intégrer dans une de ses équipes de trafiquants d’essence. Mais Souleymane le double et revend à un tiers une cargaison d’essence volée, prétend ensuite avoir été saisi par la police. Moussa pète un câble, et Souleymane devient l’homme à abattre s’il ne rapporte pas le fric dans les deux jours. Fan du danseur, puis amoureuse du mec, la prostituée au grand cœur Mimi essaie de lui venir en aide.

Grigris relève du polar urbain, mais le traitement que lui réserve Haroun consiste à ralentir le rythme et à montrer le héros indécis entre action et passivité. Haroun a découvert Souleymane Démé à Ouagadougou, au Burkina Faso, et a écrit le film pour lui. La séquence d’ouverture, très réussie, découvre le danseur et ses mouvements robotiques au milieu d’un public surchauffé dans la lumière rouge d’un dancing qui semble une citation de la Fièvre du samedi soir. Toujours dissymétrique dans l’architecture épurée des plans, traversant les espaces du cadre d’une démarche à l’élégance claudicante, Démé est le mur porteur du film, mais on peut aussi considérer que le scénario le sous-utilise. L’idée de vouloir filmer quelqu’un pour ses talents de danseur en racontant une situation qui précisément l’en détourne prive de facto la fiction d’une énergie qu’elle remplace par la solennité graphique propre au cinéaste.

Naïveté. Quelque chose empêche le film de décoller. Cela tient sans doute à une stylisation plaquée sur une réalité comme on pose un filtre photographique sur une prise de vue brute. Alors oui les images sont belles, il n’est pas un plan qui ne puisse être détaché de l’ensemble et admiré comme une composition digne d’éloge (le chef op Antoine Héberlé est à son meilleur), mais pourquoi les personnages sont-ils si peu complexes, taillés qu’ils sont, d’une pièce, sur le seul modèle de la naïveté ou de la malfaisance ?

Ce que le film attrape du présent tchadien (prière le jour, débauche la nuit, tape dans le dos d’une main et tarte dans la gueule de l’autre), il le délaisse pour des séries de tableaux pensifs dans lesquels les personnages doivent se résigner à figurer dans la joliesse générale d’un agencement.

 


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