Tchad : Idriss Déby, nouveau patron de l’Afrique Centrale?
Depuis la mort de l’ancien président gabonais Omar Bongo Ondimba, la sous-région Afrique Centrale se cherche toujours un leader. Mais, il apparait de plus en que le président tchadien, Idriss Déby Itno, est en train d’endosser le costume du feu Omar. C’est du moins l’impression qui se dégage des récents événements en République Centrafricaine. En effet, pendant les négociations entre la Séléka et l’ancien gouvernement de François Bozizé, le Tchad a joué un rôle de premier plan.
Selon des indiscrétions, l’influence de Déby aura été décisive pour convaincre Bozizé de faire des concessions. Par exemple, de renoncer à un nouveau mandat en 2016. En outre, il faut bien dire que les hommes de François Djotodia ne seraient probablement pas entrés dans la capitale du pays si les soldats tchadiens et, plus largement, ceux de la FOMAC s’y étaient fermement opposés. Selon RFI, « Quand la Seleka a lancé sa première offensive sur Bangui, en décembre, les militaires tchadiens étaient intervenus. Principe de précaution, Ndjamena soupçonnait Michel Djotodia d’entretenir de bonnes relations avec la rébellion tchadienne. Mais dès janvier, le régime tchadien avait obtenu des chefs de la Seleka l’assurance que Bangui ne deviendrait pas la base arrière des opposants à Idriss Déby.
Ce qui explique aussi pourquoi cette fois, les militaires tchadiens sont restés l’arme au pied ». Qui a donc décidé de lâcher Bozizé ? Certains observateurs, peut-être un peu trop obnubilés par le rôle historique de la France en Afrique, ont tôt fait d’y voir la main des autorités de Paris. Mais, objectivement, qui mieux que Déby, parrain reconnu de Bozizé depuis 2003, aurait pu influencer de façon décisive le cours des événements ? Pas l’Afrique du Sud en tout cas. Les tentations hégémoniques de Jacob Zuma (qui a réussi à imposer son ex-épouse à la présidence de la Commission de l’Union Africaine) et le déploiement des troupes sud-africaines à Bangui, n’a rien fait d’autre que d’irriter Déby et certains de ses pairs d’Afrique centrale. François Bozizé a commis l’irréparable erreur de croire que l’Afrique du Sud avait bétonné son pouvoir.
Il en sort humilié, Jacob Zuma en sort fragilisé et, c’est Déby qui peut trinquer. En effet, plusieurs analystes politiques de l’Afrique centrale observent que le président tchadien vient de montrer qu’il avait l’étoffe pour assumer le vide laissé par Omar Bongo. En tout cas, voici ce que pense le Camerounais Shanda Tonme, écrivain et éditorialiste. « Je constate que c’est le Tchad qui joue les premiers rôles dans la sous région et qui projette une influence décisive sur les grandes questions. Nous (Cameroun, Ndlr) sommes totalement absents. Non seulement nous ne disposons plus de moyens logistiques conséquents pour un tel rôle, équipements militaires, troupes entraînés et bien équipés, stratèges conséquents, mais plus grave, la volonté humaine et psychologique est absente ». De fait, il faut dire que tout cela n’est pas pour déplaire aux grandes puissances. Au moment où les Etats s’émancipent de plus en plus, les grandes puissances ont besoin des blocs régionaux qui soient assez fédérateurs et représentatifs.
Quand ils y trouvent des interlocuteurs, il leur est plus facile d’agir discrètement. Sans heurter les sensibilités nationalistes qui peuvent se manifester ça et là. Un schéma parfait pour les autorités françaises qui n’ont plus d’autre choix que d’afficher – ne sait-que par convenance – leur volonté d’en finir avec la françafrique. Heureuse coïncidence de l’histoire, au-même moment, le Tchad est en train de réaliser des prouesses militaires au Mali. Ce qui ne fait rien d’autre que renforcer son prestige diplomatique. Déby peut-il en être fier ? Oui évidemment ! Le Tchad s’affirme de plus en plus comme une puissance en Afrique. Et améliore son image, laissant derrière lui les tristes souvenirs d’un pays chroniquement en guerre, avec son cortège de morts.
D’un point de vue personnel, Déby devient sans aucun doute un interlocuteur privilégié des grandes puissances en Afrique centrale. A l’image de Blaise Compaoré en Afrique de l’Ouest. Le président tchadien peut donc envisager le fait que son pouvoir sera plus stable. Mais, pour cela, il faudra aussi qu’il serve lui-même d’exemple car, c’est tout le monde qui va désormais l’observer. Tout un challenge!
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Le Tchad de Déby, une nouvelle puissance
Lorsqu’il a «pris acte» de la fuite du président centrafricain, François Bozizé, François Hollande a appelé le secrétaire général de l’ONU, mais aussi… Idriss Déby, le numéro un tchadien.
Cet ex-putschiste, maintenu au pouvoir depuis vingt-deux ans grâce à la présence des militaires français, revient de loin : il a snobé le sommet de la francophonie à Kinshasa, en 2012, après que des socialistes ont rappelé la disparition d’un de ses principaux opposants.
Et il avait dû renoncer en novembre à une visite à l’Elysée.
Des soldats aguerris
Idriss Déby, qui a revendiqué le premier la mort de deux chefs jihadistes au Nord-Mali, est désormais auréolé de ses succès contre al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi), aux côtés des militaires français dans le massif des Ifoghas, où ont péri une trentaine de ses soldats.
«La menace jihadiste n’a pas de visage, pas de frontière», s’est justifié le président Déby, qui a placé un de ses fils à la tête de ses 1 800 soldats au Mali.
Familiers des zones arides, habitués aux combats contre des colonnes de rebelles, ils constituent le contingent le plus courageux et aguerri parmi les troupes africaines expédiées en renfort des soldats français.
L’armée tchadienne – 30 000 hommes, financée grâce aux revenus du pétrole – fait figure de puissance militaire en Afrique, où elle a déjà été engagée au Congo-RDC et en Centrafrique, au titre du «maintien de la paix».
Le coup de main donné à la France au Nord-Mali fournit à Idriss Déby l’occasion de se poser en bouclier africain contre l’islamisme radical.
Fort de cette nouvelle aura internationale, il ne reste plus à l’ancien «dictateur» qu’à répartir plus justement ses pétrodollars…
Sources: camer.be et directmatin.fr