Une coopérative ardéchoise initie le Tchad au tourisme
La coopérative ardéchoise serait-elle si kamikaze pour envoyer des touristes au casse-pipe? Pour la première fois, elle propose à ses clients le Nord du Tchad comme destination.
Un pays longtemps en guerre qui aspire désormais à la paix. Le fondateur de Point-Afrique, Maurice Freund, sait qu’en France, la question de la sécurité est dans toutes les têtes. Surtout après le déclenchement du conflit au Mali et la dernière prise d’otages français au Cameroun. Les recommandations du Quai d’Orsay sont d’ailleurs claires : cette région du Tchad est “déconseillée sauf raison impérative”.
“Mais il n’y a rien à craindre”, martèle Maurice Freund. “Les Toubous (peuple qui vit au Nord du Tchad, NDLR) ne laisseront pas les djihadistes se développer dans leur région”, affirme-t-il.
Dans sa résidence, perdue dans la cambrousse ardéchoise, ce fin connaisseur de l’Afrique ne manque pas d’arguments : “Nous ne sommes pas fous. Au cas où la situation sécuritaire venait à se dégrader, nous cesserions sur le champ. Quand il y a un danger, on n’y va pas. À grands regrets, nous ne proposons ainsi plus de destinations au Mali ou en Mauritanie.”
Ce grand amoureux des déserts regrette surtout “l’amalgame qui s’installe”. Il l’a amèrement constaté après la prise d’otages en Algérie, en janvier dernier : “Nous avons eu de nombreuses annulations. Contre la peur, on ne peut que s’incliner.”
Sauf que le dirigeant de Point-Afrique, qui s’est de nouveau déplacé au Tchad en février, n’est pas prêt, avec son équipe, de rendre les armes. Il ne veut surtout pas anéantir le “travail colossal” de plus de deux ans afin de lancer le tourisme dans cette partie du Sahara. Rien que pour faire atterrir un Boeing 737 directement à Faya dans le Nord du Tchad, le défi a été gigantesque. Il a fallu 14 jours de transport pour amener, sur des pistes très sablonneuses, un camion-ravitailleur.
“Là-bas, le verbe prévoir n’existe pas”
Sur place, il faut former des guides, pisteurs, chauffeurs… “Là-bas, le verbe prévoir n’existe quasiment pas. Et nous sommes dans le désert. Il nous faut apprendre des Toubous les mille et une astuces indispensables pour survivre dans cet environnement”, raconte Maurice Freund.
Découvrant totalement le tourisme, les guides locaux “apprennent très vite” ce nouveau métier. “Quelque 450 personnes ont effectué ce voyage. Les progrès sont fulgurants”, se réjouit l’Ardéchois. Il observe un “taux de satisfaction exceptionnel” chez les clients de Point-Afrique : “Les fabuleux paysages corrigent les “imperfections” de la logistique. Le Nord du Tchad dispose des plus belles gravures et des canyons vertigineux.”
Point-Afrique peut compter sur le soutien de l’État tchadien. Lors du premier voyage de la courte saison touristique (janvier à mars), le tapis rouge a été déroulé pour les 130 voyageurs. Ils ont été accueillis à l’arrivée par la télévision nationale et toute la presse tchadienne.
L’objectif de la coopérative ardéchoise est, à terme, de permettre aux Toubous d’assurer eux-mêmes cette activité économique qui génère une manne financière non négligeable dans cette région “très dure”. “Notre réussite sera totale quand ils assureront à 100 % toute cette organisation”, insiste Maurice Freund. Il sait qu’il reste encore un long chemin à parcourir à travers ce majestueux désert. Les embûches ne manquent pas pour que l’aventure s’arrête du jour au lendemain. Il suffit d’un grain de sable…