Venezuela: le Comandante Chávez est mort
Le président vénézuélien vient d’être emporté par son cancer. Retour sur la vie mouvementée d’un chef d’État devenu une légende pour son peuple.
Depuis quelques jours, l’issue ne faisait guère de doute. En dépit de communiqués « officiels » rassurants, le Venezuela s’était préparé à la mort de son héros. Les allers et retours de Hugo Chávez entre Caracas et La Havane ne trompaient plus personne. L’état de santé du Comandante était désespéré. Fin février, on apprenait que « son insuffisance respiratoire n’évoluait pas favorablement ». Le 1er mars, le vice-président Nicolás Maduro estimait : « Notre président lutte pour sa vie. » La semaine dernière, des rumeurs affirmaient qu’il était cliniquement mort. Qu’à cela ne tienne, les Vénézuéliens sont sous le choc. « Un mythe est mort », explique, les larmes aux yeux, Johan Novoa, un jeune commerçant coiffé d’une casquette Fidel Castro-Che Guevara-Hugo Chávez, tout en priant pour « rendre l’amour [qu'il a] reçu ».
« Chávez, coeur du peuple »
Il existait, et il existera sûrement encore longtemps, une connexion passionnelle entre Hugo Chávez et des millions de Vénézuéliens. Intitulé « Chávez, coeur du peuple », le dernier slogan de campagne du leader latino a mis dans le mille. « C’est le premier président à s’être réellement préoccupé des pauvres », commente le journaliste révolutionnaire Miguel Ángel Pérez Pirela en évoquant les programmes sociaux impulsés par Chávez pendant ses 14 ans de pouvoir, qui ont permis de réduire drastiquement la pauvreté.
Carlos Vargas, militant du Parti socialiste unifié du Venezuela (PSUV), avance avec nostalgie une autre explication : « Chávez était un homme du peuple, il le connaissait et savait lui parler. » Lui-même avait pris l’habitude d’affirmer : « Chávez, ce n’est pas moi, Chávez, c’est vous. Chávez est un peuple, un concept : le chavisme. » Né en 1954 dans une famille très modeste des grandes plaines vénézuéliennes, deuxième d’une fratrie de six garçons, Hugo Chávez Frías a vécu une enfance difficile, « mais heureuse », selon ses propres mots. Il vendait des sucreries dans la rue pour aider sa famille et, comme des milliers d’autres jeunes, il jouait au base-ball en sortant de l’école. Au point d’avoir espéré devenir joueur professionnel. Cette légende dorée, Hugo Chávez l’a entretenue des années pendant son émission dominicale Aló Presidente, dans un style jugé « populiste » par l’opposition. Durant plusieurs heures, le Comandante exposait ses idées dans un langage simple ponctué de chansonnettes, de blagues et de petites histoires moralisatrices. « Chávez est un as de la communication directe, [c'est aussi] un affabulateur », concède l’écrivain Orlando Oramas León dans la préface des Cuentos del arañero (Contes du tisseur de toile), la compilation officielle des centaines de discours de Hugo Chávez. (suite…)