Zenab Kaïla: Une compatriote qui pleure les soldats tchadiens tombés au Mali
Ce 1er Mars marque en temps normal au Tchad l’ouverture de la traditionnelle semaine nationale de la femme tchadienne. Mais cette année, c’est plutôt un jour de deuil et de recueillement national à la mémoire des soldats tchadiens tombés au Mali.
Par: Zenab Kaïla
Cette date sera inscrite en lettre d’or dans l’agenda militaire et de défense de notre pays et aussi dans la mémoire de nombreux tchadiens.
Le Tchad pleure ses fils en ce jour de vendredi saint, les martyrs tombés sur le champ d’honneur au Mali. Ces hommes qui ont sacrifié de leur vie pour une cause qui va au-delà de nos frontières, une cause juste, celle de la paix et la sécurité dans toute la région sahélo-saharienne dont le Tchad fait géographiquement partie.
Le Tchad a en effet, déployé un contingent de près de 2000 hommes, les Forces Armées Tchadiennes d’Intervention au Mali (FATIM) dans le cadre de la Mission Internationale de Soutien au Mali (MISMA) pour prêter main forte à l’armée malienne. Ceci est sans doute diplomatiquement et militairement un symbole fort parti de N’Djamena.
Il ne s’agit pas de se poser en spécialiste de géostratégie ou de géopolitique pour analyser les enjeux de l’intervention militaire internationale au Mali ou encore de comprendre le problème malien déjà complexe depuis plus d’un demi-siècle avec le MNLA et ses velléités sécessionnistes auquel s’est rajouté dernièrement un ensemble de problèmes qui fait exploser la bombe endormie (l’effondrement du régime de Kadafi, le départ de ATT, l’AQMI, Ie MUJAO…).
C’est par contre l’expression de la vive et grande émotion ce matin au tarmac de la base aérienne Adji Kossei, la tristesse exprimée sur les visages des officiels tchadiens, des familles de victimes, des nombreux téléspectateurs comme nous et des Tchadiens tout simplement. Ma génération est celle des deux dernières décennies, de celle qui n’a véritablement pas connu la guerre et les atrocités qu’a enduré le Tchad après son indépendance dans les années 1970-80.
Nous sommes aujourd’hui extrêmement touchés par la mort de ces hommes, ces inconnus soldats avec qui nous partageons très fièrement le Tchad et la nationalité tchadienne.
Nous avons suivi avec intérêt grâce à l’équipe de la presse tchadienne qui les accompagnait (cf. reportages de Amad Makaila sur le sujet), leur départ du Tchad, leur arrivée au Mali ainsi que les déploiements et les raids sur Kidal et les autres villes maliennes du nord.
Ainsi, nous nous sommes familiarisés avec certains visages dont celui du Commandant Abdel Aziz que nous regrettons aujourd’hui.
Le devoir moral nous impose, à mon sens de se joindre à la nation tchadienne pour rendre un hommage à ces vaillants soldats qui viennent de payer au prix de leur vie l’intégrité et la paix, pas du Tchad comme fut le cas de la bande d’Aouzou mais celle d’un autre pays frère, le Mali. Ainsi, nos condoléances à leurs familles et à leurs frères d’arme des forces armées tchadiennes. Le Tchad, le Mali et toute l’Afrique leur sera à jamais reconnaissant.
Nous soutenons d’ailleurs dans ce sens l’idée émise par le collectif de soutien aux soldats tchadiens, celle de construire un mémorial à N’Djamena, dans les villes maliennes, au siège de la CEDEAO et à Addis Abeba au siège de l’union africaine, pour qu’à jamais ils ne soient oubliés.
Que la communauté internationale, la CEDEAO et l’Union Africaine en premier lieu se joigne au Tchad pour l’effectivité de la MISMA; ce qu’a d’ailleurs rappelé une fois de plus le président Déby au sommet de la CEDEAO à Yamoussokro mercredi dernier. En claire ou en langage peu diplomatique le Tchad refuse tout simplement de servir de bouclier humain ou de chair à canon.
Nos pensées et notre compassion enfin à nos blessés au Niger, à nos soldats encore sur le terrain au Mali, à leurs familles qui expriment certainement l’inquiétude qui est la leur dans une guerre encore au dénouement incertain.