Un regard sur le Tchad
En 20 ans de règne, les guerres, les rébellions, la mauvaise gouvernance, l’appauvrissement de la population tchadienne ont émaillé le pouvoir debyen. Les grands projets ne sont que des investissements improductifs. Juste des illusions. En fait, même si l’exploitation du pétrole n’a atteint sa finalité, a servi à une chose capitale : surarmer le pays et acheter les consciences. Avec l’apathie, actuelle, de la rébellion tchadienne, le président Deby semble marquer un point décisif.
Un point qu’aucun de ses prédécesseurs n’a pu le marquer. Mais le réel problème pour le Général- Président, gouverner un Etat, une République n’est commander une caserne, un bataillon. La République, en effet, a besoin non seulement de l’ordre mais aussi de la concorde, justice et prospérité. Les slogans ₺le Tchad est en chantier₺, ₺ politique de la main tendue₺, ₺quinquennat social₺ ne sont que des mécanismes, à eux seuls, ne pouvant changer le pays. Pour une nation comme le Tchad, 50 ans de guerres, la quête de la paix demeure plus qu’un impératif. Un impératif valant plus que l’organisation de simulacres élections. Les tchadiens du Nord et du Sud, à présent aspirent à la paix. En revanche, l’animal politique que Deby ne voit pas au-delà de son nez. Dommage. Non du fait de la limitation de son intellect mais de son entourage. Certains généraux et ministres préfèrent végéter dans un Etat en perpétuelle guerre que de voir les fils du Tchad unis et soudés derrière le Président. Par constatation, si Deby parvient à raisonner ses caciques, la paix au Tchad sera effective.
La rébellion tchadienne s’étouffe.
Avec ses deux entrée triomphales (celle du 13 Avril 2006 et du 02 au 03 Février 2008) à N’djaména, les politico- militaires ont connu leur apogée mais depuis lors traversent le désert à défaut d’un repère. Du tout au tout, pour la rébellion, les donnes ont changé. Elle n’est plus en rapport de force. A défaut d’un leadership charismatique, elle se déchire davantage. Pour certains analystes, elle est en hibernation pour ne pas dire en désuétude. De surcroit avec la visite à Khartoum au début de Février du Président Deby, on assiste à jamais à son enterrement. Un à un certains maquisards ont pris, tête baissée, le chemin de N’djaména. Parce que si couple Deby- El Béchir s’entend, comme d’antan, à la rébellion tchadienne, il lui restera une voie : celle de la réconciliation ou son retour à la ₺bergerie₺. Cependant un retour négocié n’ouvre aucunement la voie de la paix. En ce sens, le dialogue inclusif demeure la condition sine qua none pour le retour de la paix.
Comme le Frolinat, Deby face aux politico- militaires a su gagner la guerre et non la paix. Sur ce chemin, beaucoup reste à faire. Déclencher le dialogue inclusif, le cheval de bataille de la société civile tchadienne semble le seul issu de l’imbroglio tchadien. Avec l’arrivée de Mahamat Saleh Annadif et de Mahamat Hissein dans le cabinet présidentiel, il y a de quoi pour que la raison triomphe sur le bellicisme. Espérons qu’ils aient les mains libres afin d’orienter le Tchad vers le salut. Inversement à la politique ₺de la main tendue₺ qui n’a apporté que malheurs et divisions aux Tchadiens, le dialogue inclusif est une piste de sortie, un break. En aucun cas, il n’est contre les acquis démocratiques, plutôt il est une chance pour le pouvoir central de perdurer, en passant par la phase transitoire. Alors qui dit dialogue inclusif, dit phase transitoire afin de partir sur de nouvelles bases démocratiques et consensuelles.
Respect ! au Soudan : ne cherchons pas des poux sur une tête chauve.
Depuis la nuit des temps, le Soudan fait partie de l’histoire politique du Tchad. Il en va de la sécurité intérieure et extérieure du pays que le pouvoir central garde les liens séculaires entre les deux pays. Car le pays d’El Béchir ne cherche à vassaliser le Tchad. Comme les Etats- Unis d’Amérique sont pour le régime de Karzaï ou Israël, le Soudan l’est aussi pour le nôtre. Il est de même faiseur des rois, capable de la rosée et du feu. Les présidents Hissein Habré et Deby en sont les illustrations. Tout comme la France, tout dépend peu ou prou du Soudan. L’accalmie de ces mois, après la visite du président Deby, prouve l’importance que joue Khartoum dans la res politica tchadienne. Par déduction, toute paix, relative qu’elle soit, doit venir de l’Est. En se réconciliant avec le régime d’El Béchir, une option est prise mais il reste la rébellion, les fils du Tchad. Toute fois, cela n’est du goût de la France, qui depuis plus de 50 ans tire les ficelles de la crise tchadienne. Pis, elle n’est jamais du bon côté. Mieux pour elle que les fils du Tchad s’entretuent.
Le mutisme de la communauté internationale
Le silence de la communauté internationale face à la crise tchadienne est le plus ahurissant. Elle n’est prête à raisonner les parties belligérantes. Pour une telle crise, il ne suffit de se borner aux communiqués. En ce moment, les tchadiens ont besoin d’une médiation. Une médiation qui n’est ni juge ni partie, mandatée par l’ONU, l’OCI ou l’UA. La crise tchadienne n’est aussi complexe que la crise au Zimbabwe, Kenya, Madagascar et Birmanie. Pourquoi ailleurs on gèle les avoirs, interdit les protagonistes de voyager mais pas au Tchad afin d’aboutir à une solution durable ? Mutisme oblige. Il suffit pour la communauté internationale de s’imposer en sanctionnant sévèrement les hommes obstacles à la paix et de traîner bourreaux et seigneurs de guerres devant la TPI.
Transformer un pays sous les feux en un gigantesque chantier n’est qu’un leurre, puis que chacun garde en mémoire les dégâts des deux attaques rebelles sur la Capitale. A l’heure actuelle, pour le pouvoir central, au lieu d’organiser des pseudo- élections, il est préférable qu’il dépêche les hommes intègres et patriotes à réunir les tchadiens autour d’une table pour le triomphe des idéaux républicains et patriotiques. Certes c’est prétentieux, seulement dit- on la paix n’a pas de prix. Inch’Allah, c’est possible : « nous sommes convaincus que tous les fils du Tchad se retrouveront un jour, que les sentiments de fraternité et de patriotisme vaincront tous les obstacles » professait l’ancien Président Malloum.